Nouvelle vie [pv Mikaru]

Les vampires sont des créatures du démon, ils ont massacré sans vergogne un ordre sacré, dérangé en pleine cérémonie, et me voilà dans une sordide cellule à attendre qu’on me prépare pour un maître dont je ne veux pas. Lorsqu’ils m’ont amené ici, sans doute pour juger la marchandise, les effets de la décoction n’était pas totalement estompé, mes souvenirs sont donc très flous. A genoux sur le sol crasseux de ma cellule, salissant ma tenue de sabbat, mon chapelet pendant entre mes mais, je prie Dieu pour qu’il me sauve. Le suicide est interdit dans notre religion, je n’oserai donc jamais utiliser cette méthode pour m’échapper. J’allais devenir l’esclave de ses montres, et peut être y perdre mon âme. Par les barreaux de ma cellule, je voyais le soleil se coucher, mon répit aura été de courte durée. J’entendis des pas, et décidais de ne pas montrer ma peur, je toisais avec mépris, les esclaves qui tirèrent sur mes chaînes. On me traitait comme un animal. Et le pire c’est que cela semblait les amusés.

Ils me conduisirent à une salle de bain, ou je vis jeter pèle mêle toutes mes affaires. Il m’ôtèrent mes chaînes, et m’annoncèrent que j’avais une demi heure pour être présentable. La salle était trop haute pour espérer pouvoir sauter par la fenêtre et en réchapper. Je pris une douche, et me débarrassais de la crasse, mes poignées avaient souffert des fers. Je devais me montrer digne de ma condition, me montrer présentable en toute circonstance, il ne verrait nulle peur dans mon regard, simplement le mépris et le dégoût qu’ils m’inspiraient tous. J’enfilais une paire de bas de dentelle, puis les lourds jupons, habituellement j’avais une aide pour m’habiller le faire seul n’était pas mince affaire. Mais je parvins à ajuster convenablement la jupe sombre, et enfilais un chemisier d’un blanc cassé auquel je passais sur le col un ruban pour le maintenir fermé, puis portait mon choix sur un corset qui se fermait sur le devant. Je n’avais guère le temps pour une coiffure élaboré, et ne fis que placer une pince, faite de toile qui retombait jusque sur mon visage, visage que je maquillais. A bout de patience, puis que j’avais très largement dépassé le délai qui m’était imparti, ils rentèrent alors que je finissais de mettre mes gants. Je les toisais avec mépris, et ils ne semblèrent pas s’en soucier, ils me remirent mes fers.

Cet endroit était immense et le luxe était ostentatoire, cela n’avait rien à voir avec la sobriété de mon monastère, et bien malgré moi je fus impressionné. Le trajet parut ne jamais finir, et à chaque pas je sentais mon estomac se nouer, qu’allait-on me faire ? Enfin, les domestiques s’arrêtèrent et frappèrent à la porte. C’était donc là que résidait mon maître. Me voilà enchaîné à un vampire, seigneur, faite qu’il me tue vite.

Lorsque la porte s’ouvrit, je levais les yeux quelques secondes, c’était donc à lui qu’on m’avait vendu. Même pire que cela, puisque personne n’avait eu d’argent. Qu’on me donnait sans aucune vergogne. Immédiatement je détournais le regard, je refusais de croiser le sien. Ma main se referma autour de mon crucifix. J’ai passé toute ma vie à tenter de sauver mon âme, et me voilà pris au piège, dans l’antre même du démon, offert à l’un de ses suppôts. Un anneau de fer décorant sa lèvre étirée en un sourire qui ne me disait rien qui vaille. Qu’allais-je devenir ? Cet endroit n’était que perdition.

Celui qui allait devenir mon maître adressa un salut qui fit remonter un frisson le long de ma colonne, et j’étais bien décidée à ne pas lui rendre. On me poussa pour que j’entre complètement dans la pièce, et on ôta à nouveau les chaînes qui entravaient mes poignets. A quoi rimait ce cinéma ? On me les enlevait pour mieux me les remettre, et le fer lourd avait frotté contre la peau et m’avait blessé. J’entendis la porte se refermer. J’étais seul avec lui, et intérieurement terrifié. Je savais que ces créatures pouvaient lire les pensées, cela m’horrifiait d’autant plus, de quel droit s’octroyaient-ils des pouvoirs que Dieu seul lui-même devrait pouvoir posséder ?

Je ne pouvais empêcher de revoir les images des moines tués sauvagement de revenir dans mon esprit. Alors à demi conscient, c’est le seul souvenir qu’il me reste de ma communauté. Monstres sans cœur, interrompre une cérémonie sacré. Je pouvais dorénavant dire adieu à ma place au paradis, pourtant je refusais de tomber dans la déchéance, je mourrai en fervent croyant, avec un peu de chance, même souillé comme je l’ai été, et comme je le serai, le purgatoire voudra bien de ma pauvre âme. J’espérai juste, que s’il décide de me tuer, qu’il me tue vite. L’impardonnable serait qu’il me morde. C’est l’interdit premier, c’est dans le sang que circule l’âme, eux se nourrissent de notre âme, c’est ce que disent les livres sacrées.

Je refusais de lui faciliter la tâche, col haut, manches longues, innombrables jupons. Tout comme je refusai de lui parler. Je parlais peu de toute manière, mais m’adresser à lui m’était inconcevable, s’il avait espéré un gentil petit esclave, il n’était pas au bout de ses peines. Je ne serai pas l’écho de ma mère, qui se laissait mordre par des vampires, mon corps ne serait pas profané. Il était la seule propriété des moines. Jamais je n’aurai imaginé finir ici, notre sanctuaire était normalement secret, je ne saurai même pas y retourner, je n’ai toujours connus que ses murs. Ici, je suis perdu, je n’ai jamais fréquenté que des moines, je n’ai jamais mangé que la nourriture du monastère. Je me rendis compte à cet instant que j’étais affamé, je n’avais rien mangé depuis la veille, l’estomac trop noué pour m’en rendre compte. Qu’allait-il faire de moi, maintenant ?